Prendre son X-Wing, combattre l'empire, participer à la destruction de l'étoile de la mort, c'était possible
Deux monuments dune époque où Star Wars rimait avec maîtrise technique et ambition démesurée
Lorsque la GameCube débarque en 2001, Nintendo a besoin dun titre fort pour prouver que sa petite machine violette nest pas un simple jouet. Cette démonstration de force ne viendra ni de Mario, ni de Zelda mais bien de Factor 5, un studio déjà respecté pour son expertise technique et amoureux de lunivers Star Wars. Résultat : Rogue Leader, un shooter spatial qui marquera instantanément les esprits. Deux ans plus tard, les développeurs tenteront de pousser plus loin laventure avec Rebel Strike, un épisode plus ambitieux, parfois trop. Deux jeux inséparables dans la mémoire des joueurs GameCube, et qui méritent aujourdhui un retour en profondeur.
Revoir Rogue Leader aujourdhui, cest se souvenir dune époque où lon restait bouche bée devant un jeu vidéo. Dès lécran titre, la promesse est claire : Star Wars comme au cinéma, mais jouable. La GameCube crache des effets lumineux, des explosions volumétriques et des modèles 3D dune finesse jamais vue sur console à lépoque. Le tout tourne à une fluidité exemplaire. La mission douverture ? La bataille de lÉtoile Noire. Directement. Sans détour. Factor 5 ne perd pas de temps : on balance le joueur dans un des plus grands moments de lhistoire du cinéma, en lui mettant le X-Wing de Luke Skywalker entre les mains. Le jeu na quun seul objectif : offrir une immersion totale. Et dès les premières secondes, cest réussi. Le secret de Rogue Leader réside dans son sens du rythme, dans sa manière de transformer des scènes emblématiques en missions nerveuses, précises, presque chorégraphiées. Le jeu donne à chaque séquence une densité folle : chasse aux TIE Fighters, protection de convois, destruction dinstallations impériales, infiltration de bases Chaque mission introduit de nouvelles structures, nouvelles idées, nouveaux objectifs, le tout servi par une mise en scène soignée. Le gameplay, lui, est simple à comprendre, difficile à maîtriser. Le tir, lesquive, la gestion de la vitesse, lutilisation stratégique des alliés Rogue Leader a un parfum darcade, mais exige une grande précision. Le système de médailles bronze, argent, or poussera les plus acharnés à rejouer encore et encore, tant la marge de progression est immense.
Rogue Leader excelle également dans son ambiance sonore, un domaine où Factor 5 na jamais déçu. Entre les musiques officielles, les cris des pilotes, la radio interne, les alarmes impériales, les lasers qui sifflent le jeu donne à chaque mission une atmosphère épique, frénétique, authentiquement Star Wars.
Un jeu culte mais pas parfait
Avec le recul, Rogue Leader montre quelques limites. Sa durée de vie, tout dabord, reste courte : une dizaine de missions principales, quelques bonus à débloquer Lessentiel du plaisir provient de la recherche de médailles et du perfectionnement. Pour certains, cest un atout ; pour dautres, une frustration. La difficulté pourra également surprendre les nouveaux joueurs : Rogue Leader nest pas tendre. Certaines missions demandent une précision chirurgicale. Le jeu ne prend pas vraiment le joueur par la main, et échouer signifie souvent recommencer la mission complète. Mais ces défauts neffacent jamais la force du titre : Rogue Leader est un jeu qui impressionne encore aujourdhui, capable de procurer ce frisson propre aux grandes réussites vidéoludiques.
Rebel Strike : lambition qui déborde
Deux ans plus tard, Factor 5 dévoile Rebel Strike, suite directe et épisode final de la trilogie Rogue Squadron. Sur le papier, le studio promet une expérience encore plus riche : plus de vaisseaux, plus de missions, plus de variété et surtout une grande nouveauté : les phases à pied. Lidée part dun bon sentiment. Après deux épisodes entièrement tournés vers les vols spatiaux, Rebel Strike cherche à étoffer son gameplay. Le joueur peut désormais incarner Luke ou Wedge dans des séquences au sol : infiltration, tir, plateforme, véhicules terrestres Factor 5 veut offrir un Star Wars global, qui dépasse la simple bataille spatiale.
Les phases au sol pourtant au cur de la communication autour du jeu souffrent dune jouabilité rigide, dune caméra capricieuse et dun rythme qui casse lélan nerveux propre à la série. On sent que Factor 5 a tenté de transposer lintensité des vols spatiaux dans des environnements terrestres mais que leur moteur nétait pas pensé pour ça. La bonne nouvelle, cest que les séquences de vol, elles, restent excellentes. On y retrouve la précision de Rogue Leader, son dynamisme, ses explosions magnifiques. Le jeu brille dans la reconstitution des grandes batailles : Endor, Hoth, la Death Star II Rebel Strike regorge de missions spectaculaires, didées visuelles et deffets très avancés pour la GameCube. Le titre propose aussi un multijoueur solide, avec mode versus et surtout une campagne coopérative reprenant les missions de Rogue Leader. Cette coopération constitue encore aujourdhui la meilleure raison de rejouer à Rebel Strike. À deux, le jeu retrouve une dimension fun, immédiate, grisante.
Un jeu clivant, mais attachant
Rebel Strike na jamais fait lunanimité. Certains lui reprochent son ambition mal maîtrisée, dautres louent au contraire son audace. Ce qui ne fait aucun doute, cest que lépisode est inégal : brillant dans les airs, maladroit au sol. Un titre généreux mais imparfait, qui cherchait à élargir le cadre dune série qui, au final, navait pas forcément besoin dêtre élargie. Et pourtant, malgré ces erreurs, Rebel Strike reste ancré dans la mémoire des joueurs GameCube. Il a lodeur de la prise de risque, de la passion, du jeu qui veut offrir trop plutôt que pas assez. Cest souvent ce type de production qui marque le plus.
Que reste-t-il de Rogue Leader et Rebel Strike en 2025 ?
Une trace indélébile. Rogue Leader demeure un des meilleurs jeux Star Wars jamais créés, un chef-duvre technique et ludique. Rebel Strike, lui, est devenu un objet de curiosité, un épisode hybride, bancal mais fascinant par moments. Les deux titres partagent une qualité rare : ils respirent la passion. La passion de Factor 5 pour la technologie, pour Star Wars, pour lidée de faire vivre au joueur des scènes mythiques comme sil y était. Leur disparition du paysage moderne aucun remaster, aucun portage leur donne aujourdhui un statut presque mythologique.
Dans une industrie devenue frileuse, ces deux jeux rappellent une époque où la prise de risque et la maîtrise technique coexistaient encore. Une époque où un studio pouvait, par pur amour de la licence, transcender une console.